BITCOIN EN TEMPS DE GUERRE

BITCOIN EN TEMPS DE GUERRE

Dans les pays en guerre, on ne parle plus de bull run ni de shitcoins. On ne commente plus les fluctuations du halving ou les updates de Taproot. On ne spécule plus sur un ETF ou sur la prochaine montée de TAO. Dans les pays en guerre, Bitcoin cesse d’être une curiosité technologique, un actif volatile ou un pari idéologique. Il devient une ligne de survie. Une dernière mèche de feu dans une pièce en ruine. Dans l’Ukraine bombardée, dans le Nigéria asphyxié, dans la bande de Gaza cernée ou l’Afghanistan abandonné, il y a eu des hommes, des femmes, des enfants, des familles entières, qui n’ont eu que leur seed phrase comme passeport. Leur mémoire comme seul coffre. Leur téléphone, ou même juste leur tête, comme dernier bagage. Et Bitcoin, non pas comme un pari, mais comme un cri. Un outil de fuite. Une arme douce pour traverser les pires violences de notre siècle. Ce que beaucoup appellent « crypto-monnaie » n’a rien de virtuel dans un monde où les bombes sont bien réelles. Ce que l’Occident perçoit encore comme une lubie de libertarien californien devient, ailleurs, une planche de salut pour des réfugiés sans banque, sans papiers, sans futur. Il ne s’agit pas d’idéologie, il s’agit de réalité.

Quand la Russie a envahi l’Ukraine en février 2022, les transferts bancaires ont été stoppés dans plusieurs zones. Les guichets ont été pris d’assaut. Les distributeurs ont été vidés. Les cartes Visa et Mastercard ont cessé de fonctionner. Les banques centrales ont imposé des contrôles de capitaux. Les frontières, elles, sont restées perméables. Et ce sont ceux qui détenaient du Bitcoin, souvent dans une simple app mobile ou une wallet froide, qui ont pu franchir les lignes sans perdre l’intégralité de leurs ressources. Des centaines d’Ukrainiens ont utilisé Bitcoin pour financer leur départ, contourner les restrictions, envoyer de l’argent à leur famille. Des dons massifs ont afflué du monde entier pour soutenir la résistance ukrainienne en BTC, en ETH, en USDT. Pas besoin de virement Swift, pas de KYC, pas d’autorisation. Juste une adresse. Juste un hash. L’internet fonctionne encore ? Alors Bitcoin fonctionne encore. Et c’est une vérité crue qui ne dépend pas des analyses de JP Morgan.

Plus à l’est, en Afghanistan, c’est l’arrivée des Talibans en août 2021 qui a mis à nu l’obsolescence du système bancaire. Les comptes en banque ont été gelés. Les guichets fermés. Les femmes n’ont plus eu le droit d’ouvrir de compte. Le cash a disparu. Le dollar a fui. Les ONG ont été coupées de leurs réseaux financiers. Alors des femmes afghanes, formées discrètement à la technologie Bitcoin dans des cercles d’apprentissage clandestins, ont trouvé un moyen d’accéder à des fonds sans passer par les banques. Des journalistes et activistes en exil ont survécu grâce à leurs portefeuilles Bitcoin. Des dons ont pu être envoyés malgré le blocus financier. Il n’a pas fallu longtemps pour que les Talibans déclarent Bitcoin illégal. Mais le code ne se bombarde pas. Le réseau ne se conquiert pas. Et le protocole n’a pas de chef à capturer.

À Gaza, la situation est encore plus brutale. Sous blocus depuis plus d’une décennie, la bande de terre est isolée des circuits financiers mondiaux. La guerre ouverte d’octobre 2023 a intensifié le chaos. Les hôpitaux ont été détruits. L’économie s’est effondrée. Les banques ne sont que des façades vides. Et pourtant, certains Palestiniens ont pu envoyer ou recevoir de l’argent grâce à Bitcoin, à condition de posséder une connexion et un minimum de connaissance. Des témoignages rares, difficiles à documenter tant le territoire est verrouillé, montrent que des ONG envoient parfois des fonds en BTC, par l’intermédiaire de tiers, pour contourner les interdictions bancaires. Dans une zone où les transactions sont surveillées, contrôlées, parfois punies de mort, une clé privée devient plus précieuse qu’un billet. Le protocole est neutre. Ce sont les usages qui disent tout. Et dans les zones d’ombres, il reste parfois la seule lumière.

Au Nigéria, ce n’est pas une guerre frontale, mais un effondrement institutionnel progressif, une inflation galopante et une répression numérique qui ont conduit des millions de jeunes à se tourner vers Bitcoin. En 2021, le gouvernement a interdit les banques de traiter avec les plateformes d’échange. Résultat : les échanges pair-à-pair ont explosé. Les paiements en Bitcoin sont devenus une arme de contournement de la corruption, des arnaques et du contrôle de la monnaie. Lors des manifestations contre la brutalité policière (#EndSARS), les comptes bancaires des activistes ont été bloqués. C’est alors que des dons en Bitcoin ont été reçus pour continuer la lutte. Une réalité confirmée, vérifiable, documentée. Le chaos appelle des outils résistants. Et dans ce contexte, Bitcoin n’est pas un pari, c’est une évidence.

Les grandes puissances regardent ailleurs. Elles ne voient que le « risque de blanchiment », les « trafics » et les « perturbations monétaires ». Elles veulent imposer des lois, des restrictions, des contrôles. Elles n’ont pas encore compris que dans les marges du monde, dans les fissures de l’ordre établi, Bitcoin ne demande pas la permission. Il se propage comme une idée dont l’heure est venue. Dans chaque zone de guerre, il y a une mère, un ado, un instituteur, un réfugié, un dissident, qui a compris que personne ne viendra le sauver. Que son compte bancaire peut être vidé, son passeport confisqué, ses biens saisis, mais qu’un simple portefeuille de 12 mots peut devenir un outil de survie. Que le système bancaire mondial n’a rien de neutre. Et que la neutralité, la vraie, celle qui ne fait pas de différence entre le fort et le faible, entre l’ami et l’ennemi, c’est le code. C’est Bitcoin.

Pendant ce temps, l’Occident débat. On disserte sur la consommation énergétique du mining, on débat des régulations, on critique les maximalistes. On oublie que Bitcoin n’a pas été créé pour New York, mais pour N’Djamena. Pas pour Goldman Sachs, mais pour ceux qui n’ont jamais eu de banque. Bitcoin n’est pas un jouet de trader. C’est un abri pour les damnés. Un outil pour les invisibles. Un pont pour les coupés du monde. Et plus les crises s’accumulent, plus les guerres se multiplient, plus les monnaies s’effondrent, plus Bitcoin prend du sens. Il ne résout pas tout. Il ne remplace ni l’eau ni la paix. Mais il offre une chose que personne ne peut ôter à ceux qui le détiennent : la souveraineté.

Il est facile de le nier depuis Paris, Berlin ou San Francisco. Il est facile de dire que ce n’est qu’une mode, qu’une bulle. Mais ceux qui ont fui une ville en feu avec leur seule mémoire comme coffre-fort ne discutent pas les fluctuations de prix. Ils savent ce que ça veut dire que de pouvoir traverser une frontière avec l’équivalent d’une vie entière dans leur tête. Ils savent ce que ça vaut, de pouvoir recevoir de l’argent quand tout le reste est coupé. Ils savent ce que ça coûte, de vivre dans un monde où la propriété n’existe plus, où le droit s’efface, où la banque devient un outil de répression. Et ils savent ce que ça change, de posséder une clé privée que personne ne peut leur reprendre.

Bitcoin n’a pas besoin de justification technique, économique ou philosophique pour exister. Il lui suffit d’un homme en fuite, d’une femme en révolte, d’un peuple en ruine. Il est la réponse silencieuse à une violence systémique. Il est l’arme des désarmés. Il est l’asile numérique de ceux que le monde rejette. Et dans un siècle où la guerre devient permanente, où les conflits sont géopolitiques, monétaires, numériques, identitaires, Bitcoin devient un maquis. Un territoire invisible. Un réseau sans chef, sans frontière, sans faiblesse apparente. Un souffle qui résiste aux chars. Une écriture immuable dans le chaos.

On dira que c’est exagéré. On dira que c’est idéologique. Mais ceux qui vivent dans l’ombre des bombes savent que les banques ferment. Que les monnaies s’effondrent. Que les États censurent. Que les corps fuient, mais que les blocs restent. Les dollars s’impriment. Les systèmes s’écroulent. Les promesses se brisent. Mais Bitcoin, lui, continue. Blocs après blocs. Il ne promet rien. Il ne garantit rien. Il n’appartient à personne. Mais il est là. Et quand le monde s’effondre, être là, c’est déjà beaucoup.

 

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